Elles s’étendent parfois de tout leur long, les pattes en avant, comme le ferait un chien sur un canapé. « J’en ai même entendu une ronfler, c’est la première fois en douze ans ! », sourit Amélie Courcoul, agricultrice associée au Gaec des Landelles. Il faut dire qu’à Guémené-Penfao, au nord de laLoire-Atlantique, Beyoncé, Santiag et les quelque 180 autresvaches laitières ne s’allongent pas directement sur le sol quand elles veulent se reposer, c’est-à-dire une bonne moitié de la journée. Dans leurs logettes, toutes disposent de leur propre matelas, sur lequel a été étalé de la paille broyée. Au bout a aussi été installée une genouillère, comme une sorte de long polochon.
Des couchages pour vaches, l’idée peut faire sourire. L’unique fabricant français de matelas pour ces animaux de 600 ou 700 kg, lui, en a fait son beurre. C’est dans les années 1990 que l’entreprise familiale Bioret Agri, située à Nort-sur-Erdre (Loire-Atlantique), s’est lancée dans ce drôle de produit, fait à partir de matériaux recyclés et en moyenne vendu 250 euros l’unité. « Papa s’était inspiré du revêtement des aires de jeux pour enfants pour construire le premier, quand il a dû refaire son exploitation, se rappelle Jean-Vincent Bioret, 41 ans, qui a repris les rênes de l’entreprise en 2007 et l’a fait prospérer depuis. Avec davantage de confort, il s’est aperçu que ses vaches restaient davantage couchées, qu’elles avaient moins de problèmes de santé…. Personne ne parlait encore réellement debien-être animal, mais ça a été le jour et la nuit ! »
« Une bête qui est zen va produire du lait »
Avec quelque 200.000 matelas vendus cette année, 25 millions d’euros de chiffre d’affaires et une croissance annuelle de 15 %, le succès est au rendez-vous pour Bioret Agri, encore récemment récompensé pour ses innovations par les trophées de l’Inpi. Si des vaches du monde entier lui disent merci (deux tiers de la marchandise est envoyée à l’étranger), les éleveurs semblent aussi détendus que leurs animaux. « On a beaucoup moins de problèmes de gros jarret, au niveau des pattes, alors qu’une vache qui boîte, c’est souvent un motif de réforme, apprécie Amélie Courcoul. Surtout, une bête qui est zen est une bête qui vaproduire du lait. Il y a évidemment pleins de facteurs mais après l’installation des matelas, on est passés en quelques mois de 27 à 34 kg de lait par vache, puis à 37, avec des petites baisses quand il fait vraiment très chaud. »
Car en plus de leur éviter tout choc avec le sol ou de point de pression désagréable, les matelas dernière génération promettent aux bovins, qui supportent mal les températures supérieures à 20°C, de les rafraîchir grâce à un système ingénieux, protégé par l’un des 67 brevets déposés par l’entreprise. Après que l’eau froide qu’il contient a refroidi l’animal, « l’Aquaclim », relié à une pompe à chaleur, va collecter l’énergie fournie par la vache pour la transformer en eau chaude. Au Gaec des Landelles, on se sert de cette « zoothermie » pour le nettoyage des robots de traite.
Après les ventilateurs ou les « stations de grattage », qui ont aussi fait un effet bœuf dans les étables, c’est un problème un peu moins glamour qui occupe aujourd’hui l’entreprise. Prochaine innovation de Bioret Agri : un dispositif qui séparerait la bouse de l’urine, afin d’évacuer rapidement puis de valoriser ce liquide riche en azote. « Aujourd’hui, l’urine, acide, attaque les pieds des animaux, sans parler des émanations d’ammoniac qui sont un problème majeur », explique Jean-Vincent Bioret. En test dans une étable, cette invention pourrait être comme(uh)rcialisée en 2023.
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