En pleine session shopping, je laisse parfois traîner une oreille du côté des portants et des cabines d’essayage. Une place privilégiée pour observer la vie d’une boutique avec ses humeurs changeantes et parfois surprenantes.
ParIsabelle ThomasLe client est roi, comme le dit la formule. « À condition qu’il ne nous fasse pas tourner en bourrique », lance la jeune responsable d’une enseigne bohème chic, visiblement excédée par une cliente qui a mis le désordre sur les portants, dépliée la pile des foulards, laissé ses affaires en vrac dans la cabine, taché de fond de teint le col d’une robe. Sans dire bonjour, ni au revoir, sans doute trop occupée à ne pas interrompre sa conversation téléphonique. « Ces personnes qui nous laissent ramasser derrière elles en nous prenant pour du petit personnel sont les seules qui me donnent envie de changer de job, poursuit-elle. Je préfère les " tout ça pour ça " : vous savez, ces femmes qui essayent tout le magasin, vous font déshabiller le mannequin de la vitrine, veulent des conseils, vous interrogent sur le niveau de stock du produit, vous le font mettre de côté pour finalement ne jamais revenir. »
Repartez-vous souvent les mains vides ?
Vous avez peut-être pris l’habitude de rentrer bredouille d’un après-midi shopping. Si vous êtes exigeante sur vos choix, votre penderie doit vous dire merci. D’ailleurs, je suis la première à donner ce conseil : ne jamais se contenter d’un vêtement qui ne nous satisfait pas à 100%. Pas tout à fait la bonne coupe, la couleur attendue ou la matière qui tombe bien… Acheter par défaut est la meilleure façon de créer une garde-robe remplie de frustration et de tenues de rattrapage. On a le droit d’être hésitante, d’essayer, de réessayer pour finalement aller voir ailleurs… Jusqu’à tomber sur LA pépite. On a aussi le droit de ne pas suivre les recommandations des vendeuses. Si vous refusez de repartir avec le pantalon rose fluo de la saison qui vous va si bien, c’est que vous avez vos raisons. Prendre le temps de la réflexion ne fait pas de vous une cliente compliquée. L’incivilité, c’est autre chose.
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Faites-vous un blocage sur votre taille ?
D’expérience, je sais que la majorité des femmes ne connaissent pas leur taille et se trompent en choisissant un vêtement trop petit ou trop grand. « Dites-leur dans votre métier et vos articles qu’elles arrêtent de prétendre qu’elles font du 36 alors que le vêtement les boudine, m’a récemment soufflé la responsable d’un multimarques de quartier. Ça ne fait pas plaisir, je comprends mais aujourd’hui les tailles ne veulent plus rien dire. Impossible de leur faire entendre raison. Pour elles, c’est le vêtement qui est mal coupé. » Message passé : seul le rendu compte, pas le chiffre sur l’étiquette.
Etes-vous une flâneuse du mercredi ?
Les vendeuses expérimentées repèrent aussitôt les squatteuses. Elles touchent tout, monopolisent les cabines sans aucune intention d’acheter quoi que ce soit, questionnent sans vraiment écouter, se mêlent aux conversations, donnent des avis rarement pertinents et peuvent faire durer le plaisir jusqu’à la fermeture. Le pire, c’est lorsqu’elles prennent le magasin pour une garderie. Vous avez sûrement déjà été surprise dans une cabine par un petit être qui court partout et joue avec le rideau en se moquant de vous dévoiler en culotte aux yeux de tous ! « Pendant qu’elles essayent tranquillement, s’est un jour plaint une vendeuse, il faut surveiller le petit qui risque de s’enfuir, ma terreur. Et pour qu’il ne fausse pas notre taux de fréquentation avec des allers-retours devant le compteur de passage ! Quand je dois m’occuper des vrais clients, c’est pénible. » Elle me raconte aussi celles qui culpabilisent à la caisse devant des achats minutieusement pliés dans du papier de soie, exigent un remboursement de la totalité avant de s’éclipser. Ou encore les malines qui portent un vêtement, le rapportent en jurant que la tache était là ou que l’étiquette froissée et délavée du maillot de bain n’est pas liée à une baignade.
Venez-vous seule ou accompagnée ?
Elles entrent dans le magasin, sans aucun doute, la mère et la fille. La plus jeune, un peu ronde, marche à reculons, visiblement pas prête à délaisser un uniforme baggy camouflage. Quelques mètres devant elle, sa mère s’agite pour lui imposer robe courte, chemisier à volants et autres pièces girly sans se soucier de l’état d’esprit de son ado qu’elle assène de coups bas : « Avec un régime, tu rentrerais dans cette robe » / « Moi à ton âge, je faisais du sport pour perdre mon ventre » / « Comment veux-tu plaire aux garçons avec tes vêtements sans forme ? »… Ces phrases qui font mal, parfois pendant de très longues années, j’en entends dans les cabines d’essayage. Tout comme les remarques mitigées des copines ou du conjoint qui freinent les envies les plus enthousiastes. Il faut être sûre de soi ou se moquer totalement de l’avis de l’autre pour dépasser les critiques et choisir une tenue qu’il ou elle trouve affreuse. Généralement, les clientes accompagnées écoutent leurs proches. Tant pis pour la robe ou le pantalon qui faisait rêver cinq minutes avant. Tant pis pour la vente. Dans les boutiques, on se méfie de celles qui viennent en couple, en famille ou entre amies. Parfois à raison. Mais pas toujours pour de bonnes raisons ! On leur reproche de manquer d’audace ou de trop écouter leur entourage. Et de rapporter le vêtement conseillé par la copine trop ambitieuse, la mère ou le compagnon qui ne voit pas plus loin que ses goûts. Ce n’est pas une cliente compliquée, juste une personne qui doute et qui n’ose pas encore s’écouter.
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