Le conseil d’administration de Hockey Québec, qui tente tant bien que mal de dissimuler sous le tapis les relations de travail toxiques qui ont contaminé le siège social de la fédération ces dernières années, a largement diffusé cet été un appel de candidatures pour pourvoir le poste stratégique de directeur général.
Et selon plusieurs sources, les candidats sur la liste finale seront rencontrés en entrevue la semaine prochaine. J’y reviendrai plus loin.
Hockey Québec traverse une période charnière de son histoire. Les inscriptions sont en baisse constante dans les catégories où les enfants s’initient au hockey. En interne, des experts ont déjà sonné l’alarme. L’organisation fait par ailleurs face à une sérieuse crise de leadership, en plus d’être empoussiérée par un mode de gouvernance désuet.
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En décembre 2020, une enquête de Radio-Canada Sports avait révélé que le taux de roulement du personnel et le taux d’absentéisme étaient devenus alarmants depuis la nomination de Paul Ménard, le 26 août 2016, à titre de directeur général.
Une quinzaine de personnes interrogées avaient alors expliqué qu’une constante méfiance s’était installée entre les employés et la direction. On avait notamment évoqué des cas de directives contradictoires, de réprimandes écrites pour des peccadilles, d’employés subrepticement délestés de leurs dossiers, de microgestion de vétérans en poste depuis plusieurs décennies, d’absence de communication et même de conflits opposant la direction de HQ à la Ligue M-18 AAA (anciennement appelée Ligue midget AAA). Ce circuit de développement est pourtant un partenaire de longue date et le joyau de la fédération.
Au début de décembre, quand cette enquête avait été publiée, 50 % des 22 employés de la fédération avaient quitté leur emploi depuis la nomination de Paul Ménard. Six mois plus tard, M. Ménard était toujours en poste et le roulement de personnel était passé à 70 %.
Cette histoire avait suscité énormément de réactions, de déception et d’inquiétude dans les régions administratives de HQ et des associations de hockey mineur de la province.
Toutefois, lors de l’assemblée annuelle de Hockey Québec tenue en mode virtuel le 19 juin dernier, les intervenants du hockey québécois sont restés dans l’ignorance.
La direction et le conseil d’administration ont exigé que les questions des membres soient soumises à l’avance et par écrit. Les questions concernant la crise secouant le siège social de la fédération ont ainsi été éludées.
On s’est alors contenté d’annoncer que Paul Ménard allait prendre sa retraite au mois d’août, mais qu’il allait rester au-delà de cette date pour terminer plusieurs dossiers, tout en assurant l’intérim jusqu’à ce que son successeur soit nommé.
Cette décision vise à favoriser une transition harmonieuse tant pour les membres que pour la fédération
, soulignait, avec cynisme, un communiqué publié par HQ le 22 juin.
Ce communiqué a été la seule explication qu’on ait pu obtenir à l’époque puisque le président du conseil, Yve Sigouin, refusait aussi nos demandes d’entrevue.
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Dans les mois suivant la publication de notre enquête, la direction et le conseil d’administration de HQ se sont par ailleurs engagés dans une démarche de médiation avec le syndicat des employés.
Le médiateur affecté au dossier n’était nul autre que le médiateur en chef du ministère du Travail, Gilles Lachance. Vers la fin du printemps, ce dernier a remis un rapport dont le contenu n’a pas été divulgué aux membres de la fédération.
Le rapport soulevait des problèmes de gestion et de communication, un manque de reconnaissance du travail des employés, une utilisation déficiente des compétences des employés, un manque de clarté dans les rôles et responsabilités attribués à chacun et la nécessité de moderniser la gouvernance de la fédération.
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Cette modernisation du mode de gouvernance de Hockey Québec a été timidement entreprise cet été avec la nomination au conseil d’administration de deux personnes provenant de l’extérieur des cadres de la fédération.
Jusqu’à cette année, les sièges du conseil d’administration étaient distribués à des anciens présidents de région qu’on souhaitait récompenser pour leurs longues années d’implication. Zéro diversité. Il ne s’agissait donc pas d’un environnement favorisant les remises en question et le brassage de nouvelles idées.
Les deux nouveaux membres cooptés sont Victor Henriquez, un spécialiste en gestion de crise(!) et en communication stratégique, ainsi que Geneviève Paquette, qui occupe avec le Canadien de Montréal les fonctions de vice-présidente responsable de l’engagement communautaire et de directrice générale de la Fondation pour l’enfance.
Juste pour donner une idée de l’état des lieux, la présence d’une femme au sein du conseil d’administration de HQ relève presque de la science-fiction.
Encore en novembre dernier, Yve Sigouin expliquait l’absence totale de femmes au sein du conseil par le fait que ces postes sont bénévoles et que les femmes actives dans le milieu du hockey et qualifiées pour siéger au conseil préfèrent occuper des postes rémunérés!
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Bref, le prochain directeur général de Hockey Québec aura beaucoup de pain sur la planche pour redresser cet énorme navire et contribuer à y instaurer une nouvelle culture d’innovation et de dépassement.
Toutefois, je crois sincèrement qu’il se joindra à un groupe d’employés dévoués et fort déterminés à rehausser la qualité du hockey mineur québécois.
La bonne nouvelle, selon plusieurs sources crédibles, est que plusieurs des candidats retenus pour les entrevues sont de très fort calibre.
On retrouve sur la liste finale des candidats extrêmement respectés qui proviennent d’horizons différents (LNH, hockey junior, fédération sportive nationale, mouvement olympique et même de l’appareil gouvernemental québécois) et qui ont compilé des expériences de gestion et de planification du sport aux plus hauts niveaux.
En 2016, lors du processus ayant mené à l’embauche du précédent directeur général, le conseil d’administration de HQ n’avait pas jugé bon, même s’il s’agissait d’un poste-clé, de procéder à un véritable appel de candidatures. On avait tout bonnement choisi quelqu’un de l’interne.
Le conseil d’administration cherchait alors à s’impliquer dans les opérations quotidiennes de la fédération, ce qui était un non-sens, et il ne voulait pas d’un DG autonome. Il ne reste qu’à espérer qu’on ait tiré des leçons de ce catastrophique épisode.
Ce que je trouve intéressant dans le groupe de finalistes, c’est que la plupart d’entre eux n’ont absolument pas besoin de ce job à Hockey Québec. Ils ont des emplois ou des situations qui les satisfont. Ils ont du vécu, énormément d’expertise et ils ont levé la main pour aider
, souligne une source bien au fait du dossier.
Ce sera donc inexcusable si HQ ne se retrouve pas avec un DG autonome et de fort calibre quand cette embauche sera annoncée.