Ce n’est pas tous les jours qu’un Tarn-et-Garonnais foule le tapis rouge de la Mostra de Venise, un des plus grands festivals de cinéma du monde. Patrice Tépasso a eu cet honneur, le 7 septembre, avec toute l’équipe de « Our father the Devil », premier film de la réalisatrice américaine Ellie Foumbi. L’occasion de s’entretenir avec le comédien né en 1976 à Montauban et qui a passé toute sa jeunesse à Beaumont avant de démarrer, d’abord à Toulouse puis à Paris, une carrière de comédien.
Patrice, comment es-tu venu au cinéma alors que ce n'est pas la voie que tu avais choisie au départ dans tes études ?
En effet, je faisais un Master en sciences de l'éducation. Je suis venu au cinéma en 2010 après avoir commencé à créer une petite pièce de théâtre avec des amis. J’habitais à Rabastens dans le Tarn et on avait créé une association de soutien à Pierre Louhoua, un Ivoirien sans papiers. On a présenté un petit spectacle musical qui s’appelait « Les asperges sauvages », avec un répertoire de Brel, Brassens et Bobby Lapointe. Moi, j’y jouais un personnage. Un ami qu'on avait chargé de débriefer nos prestations sur scène m’a dit : « Tu devrais aller au Théâtre du Ring à Toulouse. Ils proposent des formations au jeu d’acteur ». Voilà comment je me suis inscrit à cette formation diplômante « Vers un acteur pluriel ». C’était intense, 30 heures de cours par semaine pendant 8 à 10 mois. J’y ai appris un théâtre très libre. À la sortie, j’ai eu mon premier statut d’intermittent. J’avais un an devant moi, alors j’en ai profité pour fréquenter l’ENSAV, l’école d’audiovisuel de Toulouse. J’y allais comme bénévole pour les projets de fin d’étude. Cela m’a permis d’affiner un peu mes envies. Moi qui étais musicien au départ, je me suis finalement orienté vers le cinéma.
J'ai beaucoup appris comme figurant mais il faut vite en sortir pour éviter qu'on vous mette dans la mauvaise case.
Pour exercer ce métier, on sait qu’il faut du talent bien sûr mais aussi un peu de chance, un coup de pouce. Il y a parfois des rencontres qui changent tout. Comment cela s’est passé pour toi ?
Cela s’est passé dans une poursuite de formation, à Paris, où je suis arrivé en 2012. J’avais besoin d’expérimenter des situations devant la caméra. J’ai poussé la porte du studio Pygmalion, à Montrouge où je suis resté pendant un an. En même temps, je commençais à élaborer mon réseau. Je partais de pas grand-chose et surtout je ne connaissais personne dans ce milieu. J’ai commencé à faire mes premiers cachets de figurant. Un tournage est quelque chose de très bien huilé, ça m’a permis de découvrir la façon très précise dont ça se passe, mais il faut vite sortir de la figuration pour éviter qu’on vous mette dans la mauvaise case.
Vous avez fini par décrocher votre premier second rôle du cinéma grâce à Catherine Corsini.
Oui, c’était en 2015 dans « La belle saison », avec Cécile de France. Je jouais Christophe, un militant du FHAR, le front homosexuel d’action révolutionnaire qui organise une expédition pour faire libérer son copain. Dans ce film, j’étais au milieu des nanas du MLF. J’en garde un très bon souvenir et je suis resté en contact avec Catherine Corsini. J’espère retravailler avec elle un jour.
Le film "Our father the Devil" a reçu un accueil très chaleureux à Venise. Les spectateurs étaient debout à la fin de la projection. Maintenant, j'espère qu'on va trouver un distributeur en Europe de façon que le film soit montré en salles.
Venons-en à ton actualité de ce mois de septembre. Tu rentres du festival de Venise. Comment ça s’est passé sur le Lido ?
Merveilleusement bien !J’y étais avec toute l’équipe du film « Our father the Devil », de la réalisatrice américaine Ellie Foumbi. Pour son premier film, elle avait obtenu une bourse de la Biennale de Venise. « Our father the Devil » a été présenté, avec trois autres longs-métrages, dans la section Biennale College Cinéma. On a tourné en juin à Luchon, car le producteur du film, l’Américain Joseph Mastantuono, a des attaches familiales dans les Pyrénées.
Quel accueil a reçu ce film à la Biennale de Venise ?
Très bon. Il a été projeté trois fois et les spectateurs étaient debout à la fin de la séance. Maintenant, on espère trouver un distributeur en Europe pour que ce film soit montré en salles. C’est un film très fort, avec des scènes dures. Il raconte l’histoire de Marie, chef cuisinière dans une maison de retraite de Luchon qui voit ressurgir son passé d’enfant-soldat au Rwanda, le jour où un prêtre arrive à l’EHPAD pour s’occuper des résidants. Elle reconnaît en lui celui qui lui avait mis des armes entre les mains.
Quel est ton rôle ?
Moi, je suis le comptable de la maison de retraite. C’est un type un peu perdu, qui cherche à se faire des amis, à créer du lien social mais il ne s’y prend pas très bien (rires).
Je viens de passer un call back à Rome pour une série Netflix Italie qui raconte l'histoire de Lydia Poet, la première femme italienne devenue avocate.
Après Venise, tu as pris la direction de Rome. Est-ce que ta carrière pourrait désormais se déplacer en Italie, le pays d’origine de tes grands-parents paternels ?
C’est possible. Depuis 6 mois, j’ai trouvé un nouvel agent à Rome donc, elle m’a mis sur des projets artistiques en Italie. Je m’étais présenté à son agence car je voulais postuler au casting du prochain film de Dario Argento. Là, j’y suis allé le 9 septembre pour un call back, la dernière étape d’un casting pour une série Netflix Italie qui retrace l’histoire de la première avocate italienne, Lydia Poet. J’aime bien les films d’époque et on m’aime bien dans ces rôles-là (NDLR : Patrice Tepasso a joué dans « Cézanne et moi », film de Danielle Thompson sorti en 2016 ; on l’a aussi vu sur TF1 et Netflix dans la saison 1 de la série « Le Bazar de la charité). J’attends la réponse après ce call back à Rome qui m’a donné l’occasion de visiter les studios de Cinecitta. C’était super !
Est-ce que tu as d’autres projets au cinéma ou à la télévision après ta prestation remarquée dans le téléfilm « Crime dans le Larzac » qu’on avait pu voir en février ?
C’est vrai que ç’a été un beau succès d’audience sur France 3 avec 6 millions de téléspectateurs. C’était un samedi soir et on a fait aussi bien que « The Voice » ! J’espère retravailler avec Francis Fourcou, avec qui j’avais tourné en 2016 dans la région toulousaine « Laurette, 1942 ». C’est lui d’ailleurs qui m’a fait rencontrer Ellie Foumbi. Là, Francis prépare une série policière qui sera tournée en Occitanie. Il aura un rôle important à me confier.
Tu viens souvent à Beaumont ou à Toulouse où vit ta maman ?
Je fais en sorte de m’organiser pour descendre un week-end par mois.
Il fait aussi de la pub pour le rugby à la télé
Depuis quelques années, les proches de Patrice Tépasso suivent aussi son parcours de comédien, à la télé, dans les écrans publicitaires. Le dernier spot en date tourné par le Beaumontois n’est pas passé inaperçu. On l’aperçoit plein cadre, en trainde sauter de joie, dans une tribune, au milieu de fans de rugby. « Pour cette campagne de communication de la LNR qui vise à inciter les gens à revenir dans les stades de rugby, ça m’a fait très plaisir qu’on m’appelle en tant que Tarn-et-Garonnais ».
Patrice est le fils cadet de Marius Tépasso, le regretté président du Stade Beaumontois Lomagne rugby décédé en 2012. Même si lui-même a chaussé, enfant et adolescent, d’autres crampons, ceux de football au FC Beaumont ou encore à Larrazet, il fait partie de la famille du rugby, comme ses frères Philippe Tépasso et Christophe Larrieu. Samedi dernier, la page Facebook du SBLR n’a pas manqué de relayer le clip de la LNR. « Ils sont partout ces Beaumontois ! »