Juin 2020, soit quelques jours après la fin du lockdown décrété en raison de la pandémie de coronavirus. Nous sommes assis dans le lobby du Grand Resort Bad Ragaz. En face de nous, la plus grande sportive suisse de tous les temps, celle qui, si longtemps, ne voulait rien avoir à faire avec les médias. Elle nous regarde, nous questionne.
Il n’a pas été facile d’entrer en contact avec Martina Hingis. Après de nombreux refus au fil des ans, elle avait enfin accepté de nous parler. Cette première rencontre fut suivie par beaucoup d’autres, durant lesquelles elle nous a raconté sa vie. Pendant près d’une année, nous nous sommes souvent retrouvés et là, soudainement, la question tombe:
«En fait, pourquoi avez-vous voulu passer autant de temps avec moi?»
«Pourquoi avez-vous accepté de participer?» lui avons-nous répondu.
«Parce que j’ai remarqué que, peut-être une fois, je pourrais expliquer ma version des choses. Me montrer telle que je le suis réellement. Je me suis dit: la chance se présente et j’espère qu’il en sera ainsi.»
Elle qui habituellement parle sans points ni virgule, qui plaisante et rigole en permanence, s’offre une plus longue pause.
«J’aimerais juste que l’on montre enfin mon vrai visage. Pas la chipie arrogante qui refusait de donner des interviews. Non, je veux expliquer la Martina que je suis réellement.»
S'en est suivi ce qu'elle nous a répété depuis lors, jusqu'à la dernière rencontre peu avant la parution de ce texte: «Mon histoire n'est pas une histoire de victime, c'est l’histoire d’une réussite.»