Le bilan de fin d’année est positif pour la construction métallique engagée dans de nombreux chantiers, allant du bâtiment industriel aux gares des JO 2024, dans un contexte où les prix de l'acier se stabilisent.
Roger Briand, président du Syndicat français de la construction métallique confirme la reprise de la croissance du secteur, soit + 6,5 % à fin août (versus 2020). Fort de 800 entreprises, soit 20 000 personnes, le syndicat espère même atteindre 8 à 9 % de croissance d’ici à fin décembre et demeure optimiste pour le premier semestre 2022, grâce à de bons carnets de commandes.
Le chiffre d’affaires annuel s’établit ainsi à 3,9 milliards d’euros, dont 10,8 % à l’export. Avec une production annuelle de 780 000 tonnes, l’activité retrouve donc ses niveaux d’avant crise, soit + 8 % par rapport à 2020 et + 2 % à 2019.
Les bâtiments industriels destinés aux secteurs logistique, agroalimentaire, pharmaceutique, ou luxe représentent plus de 61 % du tonnage mis en oeuvre. La demande d’entrepôts dédiés au e-commerce a également augmenté ces derniers mois. « Ils ne sont pas réalisés uniquement en construction métallique, mais cette solution demeure pertinente pour des projets jusqu’à 5000 m2 » explique Roger Briand.
De gauche à droite : Jean -ebastien Courivaud, responsable délégué chez Legrand, Roger Briand, président du Syndicat français de la construction métallique, Julien Fraccaroli, directeur chez Fayat Metal Grands Projets, Yunus Avci, chargé d'affaires chez Legrand et pierre Raymond, directeur général chez Gagne.
La commande publique donne du souffle à la profession
Autre secteur important pour la construction métallique, celui des bâtiments agricoles qui « ont bénéficié d’une bonne reprise » avec 13 % du tonnage mis en oeuvre
A noter en outre le souffle donné par la commande publique (« plus rare » regrette le syndicat) sur le secteur, grâce aux travaux du Grand Paris Express, dans la perspective des Jeux olympiques 2024, notamment les lignes 16 et 17. Plusieurs gares et passerelles seront ainsi réalisées en construction métallique.
Les acteurs du secteur notent de nombreuses demandes et sollicitations de devis pour de nouveaux projets. Les entreprises dont les marges ont été impactées en raison des hausses des coûts des matières premières constatent cependant une baisse des prix de l’acier depuis le 1er septembre. « Les prix ont diminué de 3 à 4 % mais nous restons dans l’expectative » relève Roger Briand.
Protestations de la filière acier contre le mode de calcul de la RE2020
Si la conjoncture offre des motifs de satisfaction à la profession, d’autres sujets viennent en revanche plomber l’ambiance. C’est le cas de la prochaine réglementation RE2020 et de son mode de calcul basé sur la méthode de l’ACV dynamique (et non plus « statique »).
L’ACV ou Analyse du cycle de vie permet de mesurer les impacts environnementaux des produits. En choisissant l’ACV dynamique, le gouvernement se voit reprocher de privilégier les matériaux biosourcés dont le bois (au passage, un matériau concurrent du métal sur certains projets).
La méthode pénalise en effet davantage les émissions de CO2 produites en début de cycle de vie qu’en fin de vie. Or, le bois stocke le carbone et affiche un bon bilan dès l’origine. Mais il en libérera en fin de vie (enfouissement ou combustion), ce qui semble paradoxal et « injuste » aux yeux de la filière acier (ainsi que celle du béton) qui fait des efforts pour améliorer son empreinte carbone et recycler ses matériaux.
Recyclage de l’acier : un atout amoindri par le calcul de l’ACV dynamique
Toutefois l’introduction du module D de l’analyse du cycle de vie d’un produit, en l’occurrence de fin de vie, permet de valoriser le recyclage de l’acier, souligne Roger Briand."Mais il est raboté de 43 % par l'usage exclusif de l'ACV dynamique, une double peine pour notre filière", regrette le président.
Ce parti pris réduit les vertus de recyclage en termes d'émission, alors que la filière est investie dans cette démarche et souhaite l'amplifier. En effet, l’acier est déjà recyclé à plus de 90 %. Mais en rendant exclusif l'ACV dynamique, le gouvernement freine les solutions de recyclage de l'acier, estime la filière.
Selon le syndicat qui reprend les estimations d’Arcelor Mittal, plus de 650 000 tonnes d’acier sont recyclées chaque année. Il est vrai que le marché de la récupération de la ferraille existe depuis des années, avec des prix de vente de l’ordre de 300 euros par tonne (contre des prix d’achat de l’acier avoisinant les 800 à 900 euros)
L’acier peut être utilisé et réutilisé à l’infini, affirme le syndicat qui se dit exemplaire en la matière. La profession veut en effet développer le réemploi de l'acier (sans impact carbone lors de sa seconde vie, selon la RE2020) et l'intégrer dans la réalisation de bâtiments mixtes acier, bois, béton, à bilan bas carbone. Un travail mené par les bureaux d'études du CTICM....
Filière REP bâtiment : la construction métallique partie prenante
La création d’une filière REP Bâtiment* (filière de Responsabilité élargie des producteurs les obligeant à valoriser les déchets du BTP) est par ailleurs mal vécue par la profession qui s’estime pénalisée. « Nous allons devoir financer un éco-organisme pour organiser le recyclage des autres matériaux » reprend Roger Briand.
Alors quitte à être assujetti à cette éco-contribution, le syndicat a décidé de prendre le taureau par les cornes : la profession s’est donc déclarée « metteur sur le marché » en tant que producteur et fabricant des pièces de structures des constructions.
Avantage : la profession pourra ainsi participer à la gouvernance de l’éco organisme (Valobat) et défendre sa singularité. « Avec un point de vigilance sur en ce qui concerne la fabrication étrangère qui devra être soumise à l’éco contribution pour nous éviter une concurrence déloyale » termine Roger Briand.
Dernier sujet d’importante pour le SCMF : celui du recrutement. A l’instar des métiers manuels et globalement du Bâtiment, la construction métallique souffre d’une mauvaise (et fausse) image. « On ne connaît pas nos métiers et on les confond avec ceux de la sidérurgie » regrette le président qui évoque les lignes de fabrication automatisées performantes du secteur.
Or, la profession manque d’ingénieurs, techniciens supérieurs, opérateurs sur machines à commande numérique, conducteurs de travaux. Elle continuera de sensibiliser les jeunes à ces métiers d’avenir, notamment grâce à son association APK (association pour le développement des formations de la construction métallique.
*Dont on attend toujours la publication du décret
Trois gares font le choix du métalLa gare de RennesIl aura fallu 10 ans pour admirer enfin la nouvelle gare de Rennes et son ambiance très lumineuse : elle a nécessité 5 ans d’études et 5 ans de travaux. La gare qui doit accueillir 30 millions de voyageurs d’ici 2040 s’inscrit dans un projet urbain de paysage construit reliant le Nord et le sud en enjambant les voies ferrées. La société Gagne (Groupe Briand) a réalisé la charpente métallique, la couverture, les façades ainsi que les structures de passerelles. Soit une ossature métallique de près de 1000 tonnes, l’installation de 2000 m2 de façades vitrées et de 300 m2 de toiture ETFE. Les gares de Pont de Rungis et Maison BlancheCes nouvelles gares du Grand Paris (montage du clos-couvert au printemps 2022 pour une ouverture du tronçon pour les JO en 2024) sont réalisées par Fayat Metal Grands Projets. Elles ont nécessité 6500 heures d’études d’exécution pour répondre aux exigences BIM du projet. Elles se caractérisent par la mise en oeuvre d’arches en PRS de 35 m de portée sur lesquelles viennent reposer les poutres treillis de 25 m supportant la toiture. Les 500 tonnes de charpente métallique seront pourvues d’un traitement anticorrosion galvanisé et de peinture intumescente. L’entreprise réalisera également les 3000 m2 d’habillage intérieur en inox, et les façades en murs rideaux et les 3000 m2 de couverture en Riverclack. La Gare de Corbeil-EssonnesC’est la société Legrand, entreprise familiale fondée en 1956, qui a réalisé cette passerelle métallique droite en plan avec accès PMR dans une gare de taille moyenne en région parisienne. Longue de 50 m, elle se découpe en 4 travées, avec 5 appuis, chacun étant constitué d’un escalier et de poteaux et tour d’ascenseur. Le point délicat demeure la pose des éléments, qui s’apparente « à une opération coup de poing » sur 2 week-end, pour ne pas pénaliser les voyageurs. La mise en place s’est faite avec deux grues de 500 et 700 tonnes. « Il faut préparer tout cela en amont pour être prêt le jour J, en sachant que le planning est mis au point par la SNCF depuis 2 ans, pour éviter les coupures de gares » soulignent les responsables chez Legrand. |
Source : batirama.com/ Fabienne Leroy